Conclusion Les tests du modèle en isolignes d'égales profondeurs de submersion appellent une série de remarques : - La première vient de la difficulté d'obtenir une bonne série d'images Landsat représentant tous les cas de figure. Si nous avons la chance de disposer d'images depuis 1984, la crue la plus faible du siècle, la série d'images est cependant discontinue et de qualité inégale, ce qui empêche de multiplier les tests, et la répétitivité de ces images n'est pas suffisante pour déterminer avec précision l'extension maximum de la crue de l'année. Il serait donc souhaitable de disposer d'images avec une grande répétitivité comme MODIS afin de pouvoir suivre la progression de l'eau dans le Delta. - La seconde remarque vient de la nature même des crues: nous avons tenté de rapporter chaque hauteur de crue-test à un modèle "normal" équilibrant les apports du Niger et du Bani avec la hauteur d'eau à Mopti et à Akka. Or toutes les crues utilisées lors de ces tests se sont révélées particulières, tantôt avec un déséquilibre entre les apports du Bani et du Niger, tantôt par un décalage anormal des dates des crues et parfois par les deux à la fois. Nous pouvons cependant tirer des enseignements du modèle : il fonctionne de manière satisfaisante pour des crues fortes à moyennes avec un ratio de confiance toujours supérieur à 83 % et dont les valeurs sont impactées plus ou moins fortement par les déséquilibres des apports entre le Niger et le Bani. Entre 6 m et 4.40 le ratio de confiance diminue, passant de 75 % pour 5.10 m à 63 % pour la crue de 4.40 m.
Au-delà de la confiance que l'on peut avoir dans le modèle, les tests laissent apparaître un certain nombre de traits communs : une mauvaise alimentation du sud du Delta qui apparaît pour le Pondori dès 6,60 m et qui se confirme pour toutes les valeurs-tests, dessinant ainsi un déséquilibre marqué entre la partie sud du Delta (la rive droite Niger jusqu Mopti ainsi que le Bani) et une rive gauche du Niger beaucoup mieux alimentée, en particulier le long du Diaka qui présente un profil en long très particulier. Cette logique "géomorphologique" qui traduit des inégalités dans la subsidence de la cuvette deltaïque se trouve confortée par les tests. S'y ajoute également, à une échelle plus fine, une logique locale, liée à la propagation de l'inondation : une formation profonde (VB, B) entourée de formations moins profondes ou exondées sera mal alimentée, voire pas alimentée du tout, révélant des effets de seuils comme dans les périphéries du Delta ou du Pérou Dialloubé. Au contraire, des formations peu profondes enchâssées dans des grandes cuvettes seront fortement végétalisées sur les images Landsat. Pour imparfait qu'il soit, le modèle fonctionne de manière satisfaisante pour des crues comprises entre 6 m et 6,60 m, ce qui représente 73 % des crues entre 1922 et 2014 (60 ans sur 82 années de relevés complets). Le modèle commence de se dégrader entre 6 m et 5.10 m (22% des crues), pour dysfonctionner au-dessous de 5,10 m (4 ans sur 82 ans soit 5 % des relevés). Trois questions se posent cependant : 1 - Les crues "normales" avec un apport équilibré en volume et dans les temps de propagation existent-elles ou sont-elles un artifice commode de calcul ? 2 - Le modèle fonctionne plat", un peu comme une baignoire que l'on remplit à un certain niveau. Est-t-il possible de le transformer en Modèle Numérique de Terrain comprenant les pentes et les altitudes réelles du Delta ? Nous tenterons de répondre ultérieurement à cette interrogation. 3 - Les crues du Niger à Mopti sont comprises historiquement entre 4.40 m en 1984 et 7.39 m en 1924 (avec 15 relevés sur 82 dépassant les 7 m). Le modèle ne peut pas prévoir au-delà de 6.60 m. La différence entre la crue la plus forte (7.39 m) et la crue de référence (6.60 m) est de 80 cm, ce qui est considérable. Entre 6.30 m et 6.60 m, les surfaces potentiellement inondables augmentent de 8 % par tranche de 10 cm. Rapportée à la plus forte crue enregistrée, l'augmentation de la surface inondable serait de l'ordre des deux tiers de la surface inondée à 6.60 m, soit une surface qui passerait de 1 700 000 ha à près de 3 000 000 ha. Vers l'est la morphologie limite très fortement les possibilités d'extension de l'inondation. En effet, le contact de la bordure est du Delta avec sa marge s'opère par un glacis avec une pente de 10‰, ce qui entraînerait une translation très faible de la limite de l'inondation (de l'ordre de 80 m pour 80 cm de crue supplémentaire). La situation est cependant radicalement différente sur la bordure ouest du Delta la cuvette deltaïque est en contact avec le "Delta mort", ancienne zone d'épandage du Niger avant sa translation vers l'est. Il faudrait disposer d'un modèle numérique de terrain à échelle décimétrique pour pouvoir calculer la surface que pourrait prendre l'inondation à sa cote maximum.
* selon que l'on prend en compte les surfaces totalement inondées (84.4 %) ou l ' ensemble des surfaces - totalement et partiellement inondées- (93.3 %). Si l'on suppose que les surfaces partiellement inondées le sont, en moyenne, à 50%, le ratio de confiance s'établit à 88.9 %
Crue  à l'échelle de Mopti (m)   Ratio de confiance   (%)   6.60   83.6   6.21   Entre {93.3   et 84.4}*   5.97   85.6   5.10   74.7   4.40   63.3